Disserter sur une oeuvre intégrale. La poésie de Rimbaud dans les Cahiers de Douai est-elle une poésie de la fugue, de l'errance et du mouvement?

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Disserter sur une oeuvre integrale bac 2024

 

Disserter sur une oeuvre intégrale  Les Cahiers de Douai, Arthur Rimbaud. Parcours bac "Emancipations créatrices" 

RimbaudDisserter sur une oeuvre intégrale 
Les Cahiers de Douai, Arthur Rimbaud. Parcours bac "Emancipations créatrices" 

Sujet de dissertation : 
La poésie de Rimbaud dans les Cahiers de Douai est-elle une poésie de la fugue, de l'errance et du mouvement? 
Vous répondrez à cette question dans un développement organisé. Votre réflexion prendra appui sur les Cahiers de Douai, les textes et documents étudiés dans le cadre du parcours "Emancipations créatrices", ainsi que sur votre culture personnelle. 
 

Dans quelle mesure la poésie de la fugue et du mouvement permet-elle la reconquête du sens? 


 Rimbaud 1   Problématiique

Dans quelle mesure la poésie de la fugue et du mouvement permet-elle la reconquête du sens? 


Dans le but de répondre à notre question, nous verrons en quoi le poète toujours en mouvement associe le thème du départ à un élan poétique pour une reconquête du sens.


Plan : 
I - Un poète toujours en mouvement
1- La fugue inhérente à la personnalité de Rimbaud
2 - La fugue libératrice est associée à l'errance et au mouvement 
3 - Le besoin d'un ailleurs s'accorde avec le thème du bohémien. La fugue est une aventure sans destination
II - Une poésie en mouvement
1 - Le thème du départ : l'idéal du mouvement
2 -Un élan poétique : le mouvement
3 - Transgression poétique
III - Le mouvement pour une reconquête du sens 
1 - Une poésie qui se cherche : un art de vivre
2 - L'unité originelle retrouvée
3 - dans la religion de l'amour : une Nature personnifiée et déifiée 

I - Un poète toujours en mouvement

RimbaudI - Un poète toujours en mouvement
1- La fugue inhérente à la personnalité de Rimbaud

     Rimbaud est toujours animé par un besoin de partir, de fuir son quotidien pour se perdre dans la nature. Cette aspiration à l'errance est inhérente à sa personnalité, dès l'adolescence, il fuit le milieu familial, Charleville et sa vie trop médiocre dont le dégoût est exprimé dans les vers satiriques de la poésie "A la musique". Son besoin de fuir est grand comme le montre la lettre de Rimbaud à Izambard, "Je meurs, je me décompose dans la platitude, dans la mauvaiseté et dans la grisaille". Les fugues se répètent et c'est au cours de la seconde, le 7 octobre 1870 qu'il complètera l'ensemble des textes qui aura pour nom Le Cahier de Douai. 
2 - La fugue libératrice est associée à l'errance et au mouvement 
     Dans le sonnet "Rêvé pour l'hiver" écrit par Rimbaud lors de sa fugue en Belgique, il évoque ses impressions de départ. Si la poésie fait l'éloge de la sensualité, elle représente également la fugue, symbolisée par le train en fait synonyme de liberté car elle connote "un ailleurs", la fuite du carcan familial. La fugue est donc libératrice, l'inconnu attire Rimbaud, poète toujours en mouvement, en quête d'un ailleurs : 
"L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fou repose
Dans chaque coin moelleux."
La fugue libératrice est associée au mouvement et à l'errance
3 - Le besoin d'un ailleurs s'accorde avec le thème du bohémien. La fugue est une aventure sans destination
     Le besoin d'un "ailleurs" s'exprime à plusieurs reprises dans les Cahiers de Douai. On le retrouve dans le thème de la promenade. La poésie "Sensation" évoque un rêve, un projet d'évasion comme le montre le champ lexical du voyage "j'irai", "bohémien", "sentiers", "loin", "bien loin". Ce projet sera accompli ainsi que le suggère la présence des verbes au futur "j'irai", "j'en sentirai", "je laisserai". C'est une certitude. Dans quel but? Ce rêve répond à un besoin d'évasion. Les poésies animées par le mouvement avec une récurrence du thème de la marche sont nombreuses ( conjugaisons avec le verbe "aller", au présent, au futur et à l'imparfait) par les "sentiers", "chemins", "au bord des routes". Une quête de l'infini, la marche est associée au "ciel", "à l'azur" avec des repères symboliques comme l'aube et le soir qui sont les deux temps de la création poétique pour Rimbaud. Le thème du bohémien s'accorde avec le voyage présent dans "Ma bohème", "Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées/Mon paletot aussi devenait idéal". C'est l'aventure qui attire Rimbaud car il n'est pas question d'un point d'arrivée, d'une destination. Le départ même, l'idée d'une aventure nourrissent le poète. 

Transition 
     Un "ailleurs" libérateur, un poète toujours en mouvement mais ce n'est pas qu'au niveau physique que ce mouvement se traduit car toute la poésie s'imprègne de cet élan. L'écriture est en mouvement car elle se cherche pour faire émerger une nouvelle poésie. Elle refuse tous les codes et n'a de loi que le mouvement lui-même. 
 

II - Une poésie en mouvement

RimbaudII - Une poésie en mouvement
1 - Le thème du départ : l'idéal du mouvement

     Le thème du départ nourrit également l'écriture du poète, il est source d'inspiration. Cette soif de liberté se réalise dans la poésie ellle-même et par les fugues. Dans sa quête d'un paradis perdu, c'est la médiocre réalité que Rimbaud fuit pour nourir son âme par les voyages et le souffle des mots, sous la plume qui se dérobe au quotidien, il redonne sens à la vie. L'idéal du mouvement se traduit dans l'isotopie du mouvement. On retrouve ce thème rimbaldien dans "Sensation. Cet idéal est suggéré par le jeu rythmique. Le vers 7 est évocateur de l'idéal de vie du poète et cette poétique de l'ailleurs, "Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien". 
2 -Un élan poétique : le mouvement
     Rimbaud s'épanche dans "A la musique", il nous livre ses anecdoques autobiographiques dans "Roman" par le choc des mots, il relate la jeunesse au travers d'une expérience amoureuse, il nous chante une romance. L'élan poétique est peut-être plus représentatif du poète qui assiste à l'éclosion de sa pensée dans "Buffet". Dans sa lettre à Paul Demeny, Rimbaud confie que le poète doit se faire "voyant". C'est dans cet esprit qu'il transforme un simple objet familier et quotidien en objet poétique, singulier. Le buffet est un objet précieux, il est poétisé, il raconte l'histoire des temps anciens, il garde en secret, les souvenirs.  Il est la mémoire du temps passé. Il en est symboliquement, le souvenir, « cheveux , « médaillons » et « portraits » qui représentent des personnes, ou encore un évènement particulier avec « fleurs séchées » Rimbaud transforme l'objet et lui donne une âme, il transforme la réalité quotidienne en la sublimant du regard. Cet élan poétique permet à Rimbaud d'assister "à l'éclosion" de sa pensée : "je la regarde, je l'écoute : je lance un coup d'archet : la symphonie fait son remuement dans les profondeurs ou vient d'un bond sur la scène." Ces mots du 15 mai 1871 dans sa lettre à Paul Demeny traduisent l'idée d'une poésie en mouvement. 
3 - Transgression poétique
   Le mouvement est associé à la liberté créatrice. La transgression poétique favorise la quête de la nouveauté.  La langue poétique se libère et Rimbaud s'émancipe de la tradition. Les mots crus, grossiers, quotidiens bouleversent la poésie et 
s'inscrivent dans une nouvelle écriture poétique. Ainsi, dans "Vénus Anadyomène", il chante la laideur, il n'hésite pas à utiliser le mot "anus" à la fin du sonnet ou encore pour décrire les enfants des rues dans "Les Effarés", le lecteur peut lire au vers 3, "leurs culs en rond". Le vocabulaire du quotidien est présent dans "Roman" avec "bocks" vers 2 pour désigner la bière. Des interjections comme formes élémentaires de l'expression apparaissent dans le "Bal des pendus", "Hurrah!", vers 13 -25, "Hop", vers 15. Si l'écriture est libérée, la versification se libère, le rythme se disloque, les rejets et contre-rejets se multiplient et les rimes sont audacieuses. Rimbaud, héritier de l'alexandrin en brise la régularité.  A la dislocation du rythme s'ajoutent de nombreux rejets ou enjambements par exemple dans "Le Dormeur du val", 
"Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu, 
Dort ; ... "
La composition strophique des poésies des Cahiers de Douai est régulière, deux quatrains et deux tercets mais le poète fait de nombreux écarts dans l'agencement des rimes. Par exemple dans "Le Dormeur du val", les rimes sont croisées et non embrassées dans les quatrains. Le poète ne respecte pas la règle de versification qui impose un seul jeu de rimes pour les deux quatrains abba-abba- Nous avons l'enchaînement abab - cdce -

Transition
Le mouvement est associé à une totale liberté de créer. C'est une poésie qui se cherche dont le mouvement est tendu vers la reconquête du sens. 
 

III - Le mouvement pour une reconquête du sens 

Rimbaud 1III - Le mouvement pour une reconquête du sens 
1 - Une poésie qui se cherche : un art de vivre
     Rimbaud privilégie le bonheur de l'instant qui se conjugue avec le primat de la sensation. La poésie devient un art de vivre, il s'agit d'être "heureux comme avec une femme", Sensation vers 8. Retrouver l'innocence du désir, se laisser envahier par une certaine sensualité, "Ô splendeur de la chair", "Soleil et chair", et retrouver l'origine du monde. Le poète se fait démiurge et s'accorde avec le monde pour en livrer le feu sacré à l'humanité. Tel Prométhée, il revient aux origines du monde. 
"Tu surgiras, jetant sur le vaste Univers
L'amour infini dans un infini sourire!
Le Monde vibrera comme une immense lyre
Dans le frémissement d'un immense baiser!
- Le Monde a soif d'amour tu viendras l'apaiser"
2 - L'unité originelle retrouvée
     Ce retour à l'unité originelle traduit la nostalgie de l'âge d'or, "je regrette les temps de l'antique jeunesse". Une aspiration poétique qui se projette sur un monde imaginé et libéré des superstitions et de dieu, "plus de dieux! plus de dieux! l'Homme est Roi", vers 36. Cette quête de l'homme sans "dieux" est la quête d'un accord possible avec le monde pour l'homme. 
3 - dans la religion de l'amour : une Nature personnifiée et déifiée 
Cette religion de l'amour
Le poète se fait "voyant" pour repenser un possible accord avec le monde et l'Amour, "l'Amour, voilà la grande Foi", vers 37. Le primat des sensations élève le poète au bonheur rendu possible par une osmose avec une Nature sublimée et déifiée. La nature est sacralisée, divinisée, elle se confond avec l'amour et la femme 
"Mais l'amour infini me montera dans l'âme, 
Et j'irai lon, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature - heureux comme avec une femme". "Sensation", vers 6-8. 

 

Conclusion
     Ainsi, la poésie de Rimbaud dans les Cahiers de Douai est bien une poésie de la fugue, de l'errance et du mouvement. La fugue inhérente à la personnalité de Rimbaud est libératrice et favorise l'élan et la transgression poétique pour la reconquête du sens.
La marche du poète est la méthode pour "se faire voyant" par le dérèglement des sens. Il s'agit d'inventer une poésie nouvelle en dynamisant le travail de l'imagination. Rimbaud trouve dans la création poétique émancipatrice le chemin pour être poète et se rendre voyant, "je veux être poète et je travaille à me rendre voyant", Lettre du 13 mai.
Cependant, cet élan poétique s'exprimera pleinement dans Illuminations. 
 

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Ressources pour la classe de 1ère : Rimbaud, Les Cahiers de Douai. Parcours bac "Emancipations créatrices"

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