Alain, Propos sur le bonheur, commentaire littéraire. Thème commun avec La Fontaine, leçon concrète sur le bonheur.

Il y a un discours traditionnel (La Fontaine : « travailler, se donner de la peine, c’est le fond qui manque le moins »

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ALAIN – PROPOS SUR LE BONHEUR - Agir

ALAIN – PROPOS SUR LE BONHEUR

Agir

Lecture du texte:

Tous ces coureurs se donnent bien de la peine. Tous ces joueurs de ballon se donnent bien de la peine. Tous ces boxeurs se donnent bien de la peine. On dit partout que les hommes cherchent le plaisir ; mais cela n'est pas évident ; il semble plutôt qu'ils cherchent la peine et qu'ils aiment la peine. Le vieux Diogène disait : « Ce qu'il y a de meilleur c'est la peine. » On dira là-dessus qu'ils trouvent tous leur plaisir dans cette peine qu'ils cherchent ; mais c'est jouer sur les mots ; c'est bonheur et non plaisir qu'il faudrait dire ; et ce sont deux choses très différentes, aussi différentes que l'esclavage et la liberté.

On veut agir, on ne veut pas subir. Tous ces hommes qui se donnent tant de peine n'aiment sans doute pas le travail forcé ; personne n'aime le travail forcé ; personne n'aime les maux qui tombent ; personne n'aime sentir la nécessité. Mais aussitôt que je me donne librement de la peine, me voilà content. J'écris ces propos. «Voilà bien de la peine » dira quelque écrivain qui vit de sa plume ; seulement personne ne m'y force ; et ce travail voulu est un plaisir, ou un bonheur, pour mieux parler. Le boxeur n'aime pas les coups qui viennent le trouver ; mais il aime ceux qu'il va chercher. Il n'est rien de si agréable qu'une victoire difficile, dès que le combat dépend de nous. Dans le fond, on n'aime que la puissance. Par les monstres qu'il cherchait et qu'il écrasait, Hercule se prouvait à lui-même sa puissance. Mais dès qu'il fut amoureux, il sentit son propre esclavage et la puissance du plaisir ; tous les hommes sont ainsi; et c'est pourquoi le plaisir les rend tristes.

L'avare se prive de beaucoup de plaisirs, et il se fait un bonheur vif, d'abord en triomphant des plaisirs, et aussi en accumulant de la puissance ; mais il veut la devoir à lui-même. Celui qui devient riche par héritage est un avare triste, s'il est avare ; car tout bonheur est poésie essentiellement, et poésie veut dire action ; l'on n'aime guère un bonheur qui vous tombe ; on veut l'avoir fait. L'enfant se moque de nos jardins, et il se fait un beau jardin, avec des tas de sable et des brins de paille. Imaginez-vous un collectionneur qui n'aurait pas fait sa collection ?

Quel rapport entre agir et propos ? Quel est le contenu de la leçon ? Quelle argumentation utilise-t-il ?

Introduction

Le texte que nous allons étudier est tiré des Propos sur le bonheur, ouvrage philosophique  sur l'art d'être heureux publié en 1925. l'oeuvre est à la fois caractéristique du genre littéraire et philosophique.

Les propos sont de courts articles inspirés par l'actualité du moment. Il s'inspire de Platon, Descartes, Auguste Comte mais surtout de son premier professeur de philosophie Jules Lagneau

La question du bonheur est universelle, c’est une question humaine. Il réfléchit de manière très argumentative à la notion de Bonheur  et aux moyens pour l'homme en quête de bonheur d'y parvenir.  De nombreux paradoxes sont ainsi mis en avant en particulier autour des notions de plaisir de peine et de bonheur.

Alain est un philosophe (Emile Auguste Chartier), un professeur de philosophie au lycée Henri IV ; c’est aussi un chroniqueur, un journaliste, le propos d’Alain est un texte philosophique diffusé à la radio : conversation avec tout le monde (vulgarisation).

Quel rapport entre agir et propos ? Quel est le contenu de la leçon ? Quelle argumentation utilise-t-il ?

I L'argumentation du texte - Stratégie et procédés de l'argumentation II – La philosophie du bonheur selon Alain- L'Idée du bonheur et sa réalisation

 

I – L'argumentation du texte

Stratégie et procédés de l'argumentation

Trois termes importants : victoire difficile, c’est bonheur et non plaisir qu’il faudrait dire, le plaisir rend triste.

Lorsqu’on observe le texte, il y a des répétitions : 7 fois le mot « peine », contraste avec « peine » « plaisir » : paradoxe.

En plus du paradoxe, il y a une gradation : il utilise des exemples qui parlent à tout le monde et il fait référence à Hercule. Diogène (5ème, 6ème siècle vit dans un tonneau, ne mâche pas ses mots, est cynique.

Objection : ligne 2 et 3 « on dit partout..on dira là-dessus » : une volonté d’inclure tout le monde.

Topos :Topoi : a priori en latin. Il prend des idées et les objecte. La thèse fonctionne en deux temps : raisonnement binaire.

Cela permet d’être mieux compris. La première partie du raisonnement, est un postulat, une idée défendue. : les hommes aiment la peine car c’est un élément nécessaire pour le bonheur : peine = labeur.

Pas à pas il mène l’auditeur à sa pensée. Une thèse en deux points : référence à Hercule paradoxale : homme fort mais il est montré comme un faible. Paradoxe, donc l’effet est de montrer que tout le monde a une faiblesse.

Exemple très utilisé :  Il allège la phrase. Allure hachée ; lien logique, discours très logique, très clair.

Ce texte utilise l’énumération, antipode de la période oratoire. Longues phrases comportant différentes rhétoriques. Le billet d’humeur marque le ton.

II – La philosophie du bonheur selon Alain

L'Idée du bonheur et sa réalisation

J’écris ces propos : l’écrivain vit de sa plume.

Il apostrophe le lecteur, il le touche, inclusion de l’interlocuteur.

Thèse : ligne 26, 27

Le bonheur est difficilement accessible  ainsi que le suggère le syllogisme : bonheur = poésie, poésie= action, action=bonheur.

Le bonheur est action, il doit se faire, se constuire. Nous reprendrons pour l'illustrer la citation d'Alain, «Penser c'est vouloir». L'action délivre l'homme, le libère de la tristesse.

L’effort est le moyen de rentrer en soi. Bonheur et plaisir ne sont pas synonymes car le plaisir se reçoit selon lui. Le plaisir ne dépend pas de nous d’après Epictète, philosophe stoïcien.

Plaisir amoureux : regards,

Collectionneur : objet

On ne maîtrise pas le plaisir, le bonheur est intrinsèque, à l’intérieur de soi.

Le bonheur nécessite une action, et il nous rend autonome.

Principe Nietzsche : tout ce qui ne tue pas rend plus fort.

Le paradoxe : bonheur et peine sont indissociables.

La Fontaine : « travailler, se donner de la peine, c’est le fond qui manque le moins »

Conclusion:

Il nous donne une leçon concrète sur le bonheur. Il y a un discours traditionnel (La Fontaine : « travailler, se donner de la peine, c’est le fond qui manque le moins »). Il faut dépasser l'idée reçue du bonheur pour le mériter dans le but de le vivre. Un vrai discours philosophique qui s'adresse au lecteur. Le bonheur est une conquête et l'homme doit se battre y goûter et dépasser les idées préconçues relatives à ce concept. Ce propos a donc une portée philosophique, sa portée  est didactique.

Le but de ce propos est d'apprendre au lecteur à réfléchir et à penser rationnellement en évitant toutes les formes de préjugés. On voit qu'Alain est un humaniste cartésien soucieux de toucher l'homme dans sa conscience et sa soif de bonheur et de liberté.

Date de dernière mise à jour : 24/02/2021

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