Supplément au Voyage de Bougainville, Diderot, découverte de l'autre et d'un nouveau monde. Bac de l'EAF 2021

À travers l'évocation d'une société tahitienne utopique, Diderot met en question les principes qui régissent l'organisation de la société. La question de l'altérité, le questionnement européen

Supplement au voyage de bougainville

Exemples d'essais et de textes réduits. Contractions corrigées-support Lévi-Strauss Parcours l’Autre et l’Ailleurs 

Contraction de texte

L'essai et le résumé. Exemples d'essais et de textes réduits. Contractions corrigées-support Lévi-Strauss Parcours l’Autre et l’Ailleurs 

L'essai, bac technologique.Exemple corrigé. Les voyages et le tourisme favorisent-ils aujourd’hui l’ouverture à la diversité des cultures?Contractions corrigées-support Lévi-Strauss Parcours : l’Autre et l’Ailleurs programme français 2021-Schéma d'ensemble Travail sur les connecteurs logiques-Organisation de la pensée

Ce texte présente toutes les caractéristiques du style de Diderot et du dialogue philosophique du xviiie siècle

Le Supplément au Voyage de Bougainville, ou Dialogue entre A et B sur l'inconvénient d'attacher des idées morales à certaines actions physiques qui n'en comportent pas, est un conte philosophique de Denis Diderot écrit en 1772. Il paraît pour la première fois en volume en 1796 — à titre posthume, donc — dans un recueil d'Opuscules philosophiques et littéraires, la plupart posthumes ou inédites.

 

A  consulter, la littérature d'idées, bac de français 2021

Le mythe du bon sauvage, Diderot, le Supplément au voyage de Bougainville 

Saint John Perse, commentaires littéraires, "Le mur", Image à Crusoé, et "Vendredi" Éloge. Version du mythe du bon sauvage.

 Questionnaire sur le siècle des lumières
 

 

 

Le texte se présente comme une suite au Voyage autour du monde de Louis-Antoine de Bougainville, publié en 1769. Cela explique que le titre du texte de Diderot comporte bien une majuscule au mot « Voyage ».

Précédé de Ceci n’est pas un conte et de Madame de La Carlière, il clôt un triptyque de contes moraux rédigés en 1772qui parut dans la Correspondance littéraire

Cette œuvre a inspiré à Jean Giraudoux la pièce de théâtre le Supplément au voyage de Cook, créé par Louis Jouvet en 1935.

À travers l'évocation d'une société tahitienne utopique, Diderot met en question les principes qui régissent l'organisation de la société : le droit naturel, les lois, Dieu, la morale, la nécessité. Il distingue surtout deux origines à ces principes : l'une abstraite et peu adaptée, l'autre induite par le bonheur concret et les besoins de la société. Pour lui, la loi naturelle est la seule loi qui est indiscutable. Il remet en cause les autres lois fondamentales en les mettant en parallèle avec ce qui se passe dans la nature.

Deux grandes idées sont en question : l'origine révélée de la moralité et le caractère universel de la morale. Les deux contes qui complètent la trilogie mettent ces thèmes en perspective.

Chapitre 1 : Jugement du voyage de Bougainville

Au moment où il commence, le dialogue a l'air d'être la suite d'une conversation. Les deux personnages attendent que le brouillard se lève pour continuer leur périple. B est en train de lire le Voyage autour du monde de Bougainville. A, qui n'a pas lu cet ouvrage interroge B sur la personnalité de Bougainville (« un homme curieux qui passe d'une vie sédentaire et de plaisirs au métier actif, pénible, usant et dissipé du voyageur ») et sur son voyage, ce qui permet à B de rappeler les grandes étapes de son périple.

Ensuite sont évoquées les difficultés rencontrées : les éléments naturels, les maladies, les dégâts matériels, la difficulté d'avoir des secours. Puis ce sont des considérations sur des événements particuliers : l'attitude colonisatrice des Jésuites au Paraguay et leur expulsion ; la remise en cause du gigantisme des Patagons, tels que les avait décrits Magellan ; la sagesse et la qualité de vie des sauvages, tant que leur sécurité n'est pas en danger ; la présentation d'Aotourou, l'Otaïtien qui accompagna Bougainville à Paris et des remarques sur la difficulté de rendre compte des mœurs européennes tant elles diffèrent des leurs. Le chapitre se termine par des considérations d'ordre météorologique : le brouillard s'est levé, les deux compagnons vont pouvoir continuer leur balade. Devant la curiosité de A, B l'encourage à lire la suite du récit de Bougainville « (...) tenez, lisez, allez droit aux adieux que fit un des chefs de l'île à nos voyageurs (...) ».

Chapitre 2 : Les adieux du vieillard

Au moment du départ des Européens, le vieillard, celui qui s'était retiré et enfermé dans un mutisme total à l'arrivée des Européens, figure emblématique de la sagesse, adresse un discours, d'abord à ses compatriotes : il leur reproche de s'émouvoir du départ de ceux qu'il considère comme des envahisseurs, leur rappelant que c'est plutôt leur arrivée sur l'île qu'il faut déplorer. Il les met en garde contre leur éventuel retour, qui serait fatal pour chacun d'eux et il leur prévoit un avenir sombre : « (...) un jour, vous servirez sous eux, aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu'eux. »

Puis il s'adresse à Bougainville, « le chef des brigands », avec mépris. Il le blâme de son influence néfaste sur les Tahitiens et fait un portrait machiavélique des Européens, qui ont eu pour seul but de détruire leur bonheur. Très rapidement, le discours se transforme en un éloge de la vie sauvage et un réquisitoire contre les Européens. Il énumère les différents méfaits causés par l'expédition : les dénaturer, éveiller en eux la jalousie et la rivalité, violer leur liberté, voler leurs biens, ne pas les avoir respectés comme eux-mêmes les avaient respectés, les pervertir et leur apprendre le mal. Par delà cette accusation, on peut lire une satire de l'attitude des peuples dits civilisés qui ne sont que « des empoisonneurs des nations ». Pour finir, il implore la malédiction pour Bougainville et son équipage : « Va, et puissent les mers coupables qui t'ont épargné dans ton voyage, s'absoudre et nous venger en t'engloutissant avant ton retour. ».

A et B ne commentent pas vraiment les propos du vieillard mais ils s'attardent à justifier la véracité du discours. En effet, ce passage n'existe pas chez Bougainville et Diderot, pour donner de la crédibilité, feint de supposer que Bougainville a préféré ne pas retenir ce discours pour épargner les Européens. Comme dans les précédents chapitres, le suivant est annoncé. Enfin B fait référence à l'aventure de Barré, cette jeune femme, maîtresse de Commerson, qui avait embarqué à Saint-Malo, déguisée en homme.

Chapitre 3 : Entretien de l'aumônier et d'Orou

Le chapitre s'ouvre sur la présentation des deux protagonistes : Orou, l'hôte, âgé de 36 ans, marié et père de trois filles (Asto, Palli et Thia), et l'aumônier de l'expédition, du même âge que son hôte. Conformément au code de l'hospitalité, Orou offre une des quatre femmes à l'aumônier pour agrémenter sa nuit. Devant son refus au nom de « sa religion, son état, les bonnes mœurs et l'honnêteté » s'engage une conversation entre les deux hommes : dans un premier temps, Orou invite l'aumônier à se plier à leurs mœurs, et convaincu, le jeune jésuite cède à la tentation et accepte de passer la nuit avec Thia, la plus jeune des filles qui n'a ni mari, ni enfants.

Le lendemain, Orou demande à l'aumônier de lui expliquer ce que signifie le terme « religion ». Il expose la conception chrétienne du monde, œuvre d'un Dieu tout-puissant, éternel et invisible et le code moral chrétien dicté par Dieu, légiférant ce qui est bien et ce qui est mal, ce qui est permis et ce qui est interdit. Orou, dans une longue réplique, démontre au jésuite que les principes divins sont contraires à la Nature et à la Raison. Pour lui, l'homme n'appartient à personne. Il remet en cause le fondement et l'existence des lois morales, sociales et juridiques. Orou fait preuve de bon sens et affirme n'avoir qu'un dessein : faire le bien et respecter la nature. La discussion se poursuit, l'aumônier interroge Orou sur la question du mariage. La définition qu'il en donne est en tout point conforme à l'esprit de nature : « le consentement d'habiter une même cabane, et de coucher dans un même lit, tant que nous nous y trouvons bien (...) ». Ce qui importe c'est le fruit de l'union et Orou explique avec enthousiasme le culte de la maternité et plus une fille a d'enfants, plus elle est convoitée. La vraie richesse de l'île, ce sont les enfants, et tout naturellement la conversation s'attarde sur les rituels des enfants avant qu'ils aient atteint l'âge nubile, rituels différents selon qu'ils sont filles ou garçons. Ces rituels doivent être strictement observés sous peine d'être punis par la communauté. A interrompt la prétendue lecture linéaire du livre de Bougainville pour s'attarder sur une note en marge du texte, un commentaire de l'aumônier sur la sagesse de cette conception du mariage qui respecte la liberté de chacun. Comme dans le chapitre précédent, Diderot feint de justifier la véracité des propos et prétexte la censure de la bonne morale européenne pour justifier l'absence de ce passage dans le récit du navigateur. A et B se livrent à une digression et évoquent une anecdote contemporaine, l'aventure malheureuse de Polly Baker. Cette jeune fille, mère hors du mariage est punie par la loi. B rapporte un extrait de sa défense, mettant en évidence que son état ne résulte que de l'infamie des hommes qui profitent d'elle sans pour autant en assumer les conséquences, en toute logique, ce sont eux qui devraient être punis. Miss Polly Baker, suite à un discours argumentatif solidement construit, parvient à éviter toute punition.

Chapitre 4 : Suite de l'entretien de l'aumônier avec l'habitant d'Otaïti

Ce chapitre reprend la conversation entre Orou et l'aumônier au point où elle en était restée juste avant la digression sur le cas de Miss Baker. La ponctuation mettait d'ailleurs en évidence cette interruption du discours : « Tu l'as dit… » et tout à fait logiquement Orou poursuit son témoignage sur la conception du mariage à Tahiti et l'éloge de la maternité. La liberté sexuelle est telle que les notions d'inceste et d'adultère n'existent pas. Si une fille trop laide n'a pas de mari, c'est un devoir pour son père de la rendre mère. Si une mère n'attire plus de prétendants, c'est lui rendre hommage et la respecter pour un fils que de partager son lit.

L'aumônier interroge Orou sur le libertinage amoureux, c'est-à-dire sur les transgressions des rituels qui régissent les attitudes et les devoirs des enfants avant l'âge de la puberté. Les femmes sont identifiables à la couleur de leur voile et chacune doit respecter les lois qui régissent le voile, sinon, il y a sanction : le voile blanc désigne la jeune fille vierge avant la puberté, si elle se laisse séduire, elle est mise à l'écart dans la cabane paternelle ; le voile gris désigne la jeune fille momentanément empêchée de procréer ; le voile noir désigne les femmes qui ont passé l'âge de la ménopause ou celles qui sont stériles. Si malgré tout elles s'adonnent aux plaisirs de l'amour, elles sont exilées ou elles deviennent esclaves. Ces pratiques insistent sur le fait que l'acte sexuel a pour but premier la procréation. La fin de cet entretien est un jugement sans appel sur le ridicule et le non-sens du « vœu de stérilité », contraire à la nature, prononcé par les religieux catholiques.

Chapitre 5 : Suite du dialogue entre A et B

A et B approuvent les mœurs tahitiennes et remettent en cause la civilisation qui assujettit les hommes à des lois artificielles, arbitraires et contradictoires. Puis ils revisitent les conventions de la vie amoureuse instituées par le code civil et le code religieux au regard du code de la nature : le mariage, la galanterie, la coquetterie, la constance, la fidélité, la pudeur.

La conversation se poursuit sur les conséquences désastreuses des lois policées et sur un réquisitoire à l'encontre des sociétés européennes : en refusant de suivre les lois de la nature, l'homme est devenu malheureux, il s'est imposé des obstacles, il est la source même de ses malheurs. B résume la misère de la condition de l'homme civilisé : « Il existait un homme naturel : on a introduit au-dedans de cet homme un homme artificiel ; et il s'est élevé dans la caverne une guerre continuelle qui dure toute la vie. Tantôt l'homme naturel est le plus fort ; tantôt il est terrassé par l'homme moral et artificiel. » La discussion entre A et B s'arrête avec le retour du beau temps, et la perspective de la poursuite de leur promenade. 

" En quoi le Détour par l'Autre est-il un bon moyen de dénoncer les travers de notre société ? Le voyage est-il à la fois une ouverture sur le monde et une découverte de nous-même?  

Pour aller plus loin dans votre réflexion 

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Pour aller plus loin, vous pouvez consulter une dissertation sur le thème du voyage

Le voyage est-il à la fois une ouverture sur le monde et une découverte de nous-même?  

 
 

Paul Gauguin, Fatata te Miti (Près de la mer), 1892

Paul gauguin fatata te miti

Paul Gauguin, Fatata te Miti (Près de la mer), 1892, huile sur toile, 67,9cmx91,5cm, National Gallery of Art, Washington

Elle illustre à merveille le mode de vie tahitien qui fascinait tant les occidentaux. Les nymphes nues qui batifolent dans l’eau en toute innocence caractérisent l’âge d’or maintes fois évoqué par Titien, Fragonard, Corot, Courbet et même Degas. Il met l'accent sur l'a beauté primitive des Tahitiennes et nous met face à ce rapport à une nature omniprésente qui lui inspire son contact et son rapport à la matière. On peut en outre évoquer le thème de la baignade dans son œuvre polynésienne = image d'un paradis dans lequel on peut imaginer le premier homme et la première femme.

La relation de voyage - Le voyage est-il à la fois une ouverture sur le monde et une découverte de nous-même?  

 

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter une dissertation sur le thème du voyage

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- Donnez la définition d'une relation de voyage

Il s'agit d'un récit écrit par un voyageur qui fait au lecteur le témoignage de son aventure à travers des descriptions et anecdotes ainsi que des impressions personnelles.

- Donnez un exemple

On peut citer Marco Polo avec son livre des Merveilles.

Son livre est intitulé Le devisement du monde ou le livre des merveilles.

(devisement étant du vieux français qui signifie les choses vues et entendues.).

- La relation de voyage est-elle toujours un livre destiné au public?

On peut avancer que non car Christophe Colomb n'écrit pas de livre mais seulement des lettres à ses protecteurs dans lesquelles il partage ses découvertes.

- Quel est le but d'un récit de voyage? Les relations de voyage doivent favoriser l'évasion du lecteur. Ex, le livre des merveilles de Marco Polo. Cela suppose un mélange de faits authentiques et de références mythologiques.

- Par quelle intention la relation de voyage est-elle motivée?

Si l'on se réfère à Jean de Léry, son intention était de prendre la défense des Amérindiens contre les préjugés des occidentaux. Si au contraire, cherche l'intention chez Christophe Colomb, on dira que ce dernier recherche davantage la conquête Européenne du Nouveau Monde.

- De qui Cyrano de Bergerac s'est-il inspiré pour écrire L'autre monde ou les états et empires de la lune?

Il s'est inspiré de Lucien de Samosate qui écrit l'Histoire véritable, il s'agit d'une exploration lunaire. On peut affirmer que cet ouvrage est annonciateur des romans de science fiction.

 

 
 

Date de dernière mise à jour : 21/11/2022

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