HLP Histoire et violence. La question de la violence en philosophie. Comment dire la violence, écrire la guerre? Témoignage et mémoire

Support cours et prolongements. Essais littéraire et philosophique, sujet HLP : Essai philosophique. La violence échappe-t'-elle à notre compréhension?

Histoire et violence

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L'humanité en question

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Vocabulaire

Histoire : les faits passés qui ont marqué et construit l’humanité

Les violences dans l’histoire sont entendues comme les causes dans l’histoire, effets. Les violences comprennent les guerres, les crimes contre l’humanité…

L’histoire ne se réduit pas à un ensemble de faits passés, elle suppose la question du sens.

L'histoire appelle la philosophie de l'histoire. Elle concerne les hommes et le sens de la vie donc la recherche historique conduit à la recherche des causes, des lois, des fins des évènements. La vraie philosophie de l'histoire renvoie à la métaphysique du devenir humain, c'est-à-dire, de l'humanité toute entière, de l'homme en tant qu'il est porteur de l'humanité et de son avenir tout entier.

Le rapport, le lien entre histoire et violence en philosophie suppose la question du sens de l’histoire.

Les violences sont multiples, pour n’en citer que quelques-unes :

Violence politique, guerres, racisme, violence sociale, morale, physique, verbale…

Pour aller plus loin

A consulter

La violence dans l’histoire

Le racisme

Race/ Racisme : théorie ou doctrine selon laquelle il existerait une hiérarchie entre les "races", qui se traduit par la volonté de préserver la race supérieure de tout croisement, et qui justifie par la supériorité de la race son droit à dominer les autres groupes ou "races "tenus pour inférieurs. La notion de race n'est qu'un pseudo concept qui n'a aucun fondement scientifiques

Ex : le combat idéologique antisémite et raciste envers les juifs d’Hitler dans Mein Kampf dans lequel il valorise la supériorité de race. Le nazisme est une doctrine politique fondée sur le droit pour une race

Il existe de nombreuses formes de racismes et de discriminations (ex, l’esclavage), d’une manière générale, toutes les attitudes d’hostilité de principe et de rejet envers une catégorie de personnes est de nature raciste et hostile (Racisme xénophobe; racisme sexuel, racisme envers les migrants d’actualité de notre société déshumanisée et intolérante envers l’acte de la migration, les migrants sont perçus comme des ennemis)

Discriminations et intolérances amènent au racisme. L’ethnocentrisme est le fait de croire en la supériorité de sa propre ethnie, de sa propre culture, il y aurait donc un modèle universel d’hommes à reproduire.

Le relativisme culturel est la thèse selon laquelle le sens et la valeur des croyances et des comportements humains n'ont pas de références absolues qui seraient transcendantes et devraient être comprises et analysées que du point de vue de leur culture. Doctrine qui insiste sur la différence de culture et de valeur des sociétés

 Lévi-Strauss présente le double mouvement de nos sociétés modernes : à la fois une tendance à l'uniformisation culturelle et en même temps un besoin de se différencier en se revendiquant d’un groupe, d’une appartenance…

Rien ne marque plus l’inculture d’un homme que d’en qualifier un autre de « barbare »

« Le barbare, c’est l’homme qui croit à la barbarie » Lévi-Strauss

« Chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage . Montaigne, Les Essais

La controverse de Valladolid illustre la position ethnocentrique de l’Europe à l’époque de la Renaissance et des grandes découvertes.

La controverse de Valladolid est un débat qui opposa essentiellement le dominicain Bartolomé de Las Casas et le théologien Juan Ginés de Sepúlveda en deux séances d'un mois chacune (l'une en 1550 et l'autre en 1551) au collège San Gregorio de Valladolid, mais principalement par échanges épistolaires. Ce débat réunissait des théologiens, des juristes et des administrateurs du royaume, afin que, selon le souhait de Charles Quint, il traite et parle de la manière dont devaient se faire les conquêtes dans le Nouveau Monde, suspendues par lui, pour qu'elles se fassent avec justice et en sécurité de conscience

La question était de savoir si les Espagnols pouvaient coloniser le Nouveau Monde et dominer les indigènes, les Amérindiens, par droit de conquête, avec la justification morale pouvant permettre de mettre fin à des modes de vie observés dans les civilisations précolombiennes, notamment la pratique institutionnelle du sacrifice humain, ou si les peuples amérindiens étaient légitimes malgré de tels éléments et si seul le bon exemple devait être promu au moyen d'une colonisation - émigration.

Une question fondamentale va être débattue : les Indiens du Nouveau-Monde sont-ils des hommes comme les autres ? 

Pour aller plus loin

Autres violences

Les féminicides, les homicides, les infanticides, les parricides

Concernant les féminicides l’OMS propose plusieurs degrés dans les violences

  • le féminicide « intime », commis par le conjoint, actuel ou ancien de la victime. Selon une étude citée par l’Organisation mondiale de la santé, plus de 35 % des femmes tuées dans le monde le seraient par leur partenaire, contre 5 % seulement des meurtres concernant les hommes ;
  • les crimes « d’honneur » : lorsqu’une femme accusée d’avoir transgressé des lois morales ou des traditions — commettre un adultère, avoir des relations sexuelles ou une grossesse hors mariage, ou même avoir subi un viol — est tuée pour protéger la réputation de la famille. Le meurtrier peut être un homme ou une femme de la famille ou du clan ;
  • le féminicide lié à la dot, en particulier en Inde, lorsque des jeunes femmes sont tuées par leur belle-famille pour avoir apporté une somme d’argent insuffisante lors du mariage ;
  • le féminicide non intime, crime qui implique une agression sexuelle ou dans lequel les femmes sont explicitement visées

Violences envers les policiers

Ex : le cas de Georges Floyd aux Etats-Unis

Les violences par discrimination par rapport au genre

On peut citer le cas de Georges Sand qui, n’étant pas reconnue comme une femme écrivaine, devait emprunter un nom pour se faire passer pour un homme

Guerres et radicalités

Violences de la nature, catastrophes naturelles

La question de la violence en philosophie

Rousseau locke hobbes

C’est la question du bien vivre ensemble, du politique

De Rousseau à Hobbes

  Rousseau, le mythe du bon sauvage

 

Pour aller plus loin

 

La sociabilité n’est pas naturelle à l’homme. L’homme à l’état de nature est bon, c’est la société qui le corrompt et le rend violent. L’association ne vient pas d’un mouvement naturel mais d’un artifice permettant à l’homme de résoudre le problème de leur survie. La société est donc responsable de la montée de la violence parmi les hommes. Cette idée fait à écho à une autre idée selon laquelle les hommes préhistoriques ignoraient la violence et la guerre.

Hobbes :

L’homme n’est pas politique, il le devient, la violence est naturelle à l’homme, d’où la nécessité d’un contrat pour mettre fin à la guerre de tous contre tous. 

«L’homme est un loup pour l’homme «  conflit : «guerre de tous contre tous» : jalousie, crimes, rapports de force : état de nature.

Il faut donc imposer un pouvoir artificiellement, pouvoir appartenant à un seul homme, un souverain obligeant les hommes à se dessaisir de leur puissance naturelle. Dans ce cas une vie politique est possible. 

= L’homme par nature n’est pas citoyen. La politique est donc une construction artificielle à imposer aux hommes naturellement asociaux. 

Pour Freud, la violence est un moteur dans les rapports humains et dans l’histoire (Eros/Thanatos).

 La culture est basée sur le renoncement pulsionnel

Malaise dans civilisation, Freud

 

 

  • Qu'est-ce qui fait de l'homme un être de culture?
  • Ethnocentrisme et relativité des cultures
  • Malaise dans la civilisation de Freud 
  • Fais le questionnaire 

 

La civilisation désignant «la totalité des œuvres et l’organisation dont l’instinct nous éloigne de l’état d’animal de nos ancêtres et qui servent à deux fins : la protection de l’homme contre la mort et la réglementation des relations des hommes entre eux. «L’homme, affirme Freud, aurait donc à son compte de ses données instinctives une bonne somme d’agressivité».

Éros et Anankè ont pour fonction d’assurer les premières institutions de la société (famille, communauté de travail). Ces pulsions doivent être réprimées. Les intérêts individuels sont sacrifiés au nom de l’intérêt collectif.

Une violence inhérente à la nature humaine

La violence dont l’homme est capable n’est pas seulement réactive, il y a une agressivité inhérente à la nature humaine : «le prochain n’est pas seulement un auxiliaire et un objet sexuel possible mais un objet de tentation». Il existe une violence qui n’est pas exercée comme l’animal par instinct de survie mais par instinct d’agressivité
C’est par le biais du surmoi que la répression et la sublimation des pulsions antisociales sont possibles.

La signification de l’évolution de la civilisation doit nous montrer la lutte entre éros et thanatos telle qu’elle se déroule dans l’espèce humaine. L’agressivité constitue une disposition instinctive primitive et autonome de l’être humain

Petit questionnaire sur Freud

  • L’agressivité est-elle en question pour la civilisation?
  • Oui, c’est l’entrave la plus redoutable
  • Comment se pose la question du sort de l’espèce humaine?
  • Le progrès de la civilisation saura t’-il dominer les perturbations à la vie en commun par les pulsions d’agression et d’autodestruction?
  • Citez deux pulsions essentielles
  • La pulsion de vie et la pulsion de mort
  • Quelles sont les deux tendances de l’homme à l’origine des premières communautés?
  • Eros (pulsion d’amour) et anankè ( la tendance à la nécessité)
  •  Comment dépasser ce stade primaire «?du chacun pour soi?»?
  • Il faut gérer et substituer aux forces individuelles une puissance collective, une volonté de masse. Les pulsions d’agression sont toujours présentes dans une société civilisée.
  • Quelle est la fonction de l’éthique?
  • Elle doit inhiber les pulsions agressives
  • Comment résumer la signification de l’évolution de la civilisation?
  • Une lutte entre éros et thanatos.

Machiavel (questionnaire)

  • 1 -
  • L’État civil est-il naturel ou artificiel selon Machiavel?
  • L’État civil est artificiel
  • 2 -
  • A quel autre État s'oppose t'-il?
  • A l’État de nature
  • 3 -
  • Que suppose la politique?
  • La ruse et l'habileté
  • 4 -
  • Comment Machiavel perçoit-il la nature de l'homme?
  • Les hommes sont méchants, violents et asociaux par naturellement
  • 5 -
  • Qui est habilité à transformer la nature égoïste de l'homme?
  • Le Prince dans le cadre d'une structure politique
  • Les hommes ne font le Bien que parce qu'ils y sont contraints.
  • Le prince est « mi-homme, mi-bête» selon Machiavel car il est une combinaison de force et de ruse.

 Dans le chaos des intérêts et des crimes, guerres, génocides, Hegel souligne le lent travail d'une raison universelle.

La philosophie hégélienne de l 'histoire

Pour Hegel, le fait historique est rationnel car «tout ce qui est réel est rationnel et tout ce qui est rationnel est réel». Le réel et le rationnel sont une seule et même chose.

Le fait historique est donc intelligible; L'histoire est la manifestation de la raison dans le cours des évènements. C'est la marche rationnelle et nécessaire de l'esprit universel qui prend conscience de lui-même dans l'humanité et se projette dans le devenir.

Il y a réconciliation de l'idée et du réel chez Hegel. L'idée est ce qui se réalise dans les faits et les faits sont toujours commandés par des structures idéelles. La raison philosophique est effective et concrète. Le sens de l'histoire est compris comme une histoire du sens. Ainsi, l'histoire peut-être vue comme un progrès, une évolution au cours duquel se réalise l'idée qui donne tout son sens et représente l'humanité. Pour la philosophie le fait premier n'est pas l'évènement mais l'esprit même des évènements,l'esprit qui les a produits.

L'esprit est ce qui se réalise à travers 'histoire. Toutes les grandes formes culturelles doivent être comprises comme des manifestations de l'esprit en marche. L'histoire avec ses empires, ses luttes pour le pouvoir fait œuvre de raison. Dans le chaos des intérêts et des crimes, guerres, génocides, Hegel souligne le lent travail d'une raison universelle. Par conséquent, il ne suffit pas de plaquer sur les évènements historiques des interprétations théoriques. Il faut comprendre que la raion est l'objet de l'histoire aussi bien que de la philosophie. Dans le chaos des évènements s'accomplit la raison universelle.

Le Grand Combat, Henri Michaux. Comment ce poème dit-il la violence? Essai philosophique. La violence échappe-t'-elle à notre compréhension?

‘’Le Grand Combat»

«Il l'emparouille et l'endosque contre terre ;

Il le rague et le roupète jusqu'à son drâle ;

Il le pratèle et le libucque et lui barufle les ouillais ;

Il le tocarde et le marmine,

Le manage rape à ri et ripe à ra.

Enfin il l'écorcobalisse.

L'autre hésite, s'espudrine, se défaisse,

se torse et se ruine. C'en sera bientôt fini de lui ;

Il se reprise et s'emmargine...

mais en vain.

Le cerceau tombe qui a tant roulé.

Abrah ! Abrah ! Abrah !

Le pied a failli !

Le bras a cassé !

Le sang a coulé !

Fouille, fouille, fouille,

Dans la marmite de son ventre est un grand secret

Mégères alentour qui pleurez dans vos mouchoirs ;

On s'étonne, on s'étonne, on s'étonne

Et vous regarde,

On cherche aussi, nous autres, le Grand Secret.»

Henri Michaux, Qui je fus, 1927.

Question d’interprétation littéraire :

Comment ce poème dit-il la violence, et qu’en dit-il ?

Essai philosophique :

La violence échappe-t-elle à notre compréhension ?

 

Correction sujet HLP 

 

Question d’interprétation littéraire

On attend que les études répondent aux deux interrogatives figurant dans le sujet, sans préjuger de l’organisation.

L’on pourra aussi bien construire la réponse en les traitant successivement (ce qui correspond par ailleurs à la progression du poème), ou en les articulant tout au long de l’étude, par volonté de ne pas dissocier la forme du fond.

La richesse du poème conduit à ne pas exiger une étude exhaustive, mais quelques prises précisément étudiées, notamment :

• qu’un sort soit fait à l’invention verbale, réclamant que le langage lui-même se torde et se convulse, en travaillant et torturant le lexique ;

• qu’une attention soit portée au rythme (soit par l’étude des anaphores verbales, par celle de la ponctuation exclamative, par celle des interjections ou l’analyse de quelques jeux sonores et allitératifs…) ;

• qu’une analyse s’intéresse à la fin du texte, qui fait de la violence une quête effrénée, mystérieuse et contagieuse (« Fouille », « Dans la marmite de son ventre est un grand secret », « On cherche aussi, nous autres, le Grand Secret »).

On pourra valoriser toute tentative pertinente d’interprétation de ce « Grand Secret » de la violence (comme si le corps même de l’autre faisait écran à une vérité dont l’accès réclamerait la destruction), ainsi que tout travail sur la dimension pulsionnelle ici mise au jour.

On pourra valoriser les réponses sensibles à l’ambiguïté du ton, oscillant entre l’humour d’un pastiche rabelaisien qui traite sur le monde héroï-comique le « combat », et une froideur que l’on peut à bon droit juger dérangeante et glaçante.

Essai philosophique

Le programme limitatif défini par la note de service 2020-026 du 11 février 20201 conserve, pour l’objet d’étude « L’humanité en question », les deux entrées suivantes : « Histoire et violence » ; « Les limites de l’humain ». La perspective ouverte pour l’essai n’a donc rien pour surprendre les candidats. On n’attend pas de l’élève qu’il compose une dissertation répondant de manière exhaustive ou même en format réduit aux canons rhétoriques coutumiers. « Essai philosophique » se comprend comme un moment d’écriture dont les formes sont par définition variées. S’agissant de sa structuration formelle, l’essai est ouvert aux choix de l’élève, qui tire le meilleur parti de ce qu’il a appris au cours des deux années de formation. Les choix formels sont toujours associés au travail des idées (interrogation, analyse, argumentation, etc.)

S’agissant de ce sujet, l’essai peut être composé en tenant compte des exigences et perspectives suivantes :

• si l’essai déborde le champ de la seule lecture, de l’explication et de l’interprétation du texte, il ne constitue pas un exercice séparé : il gagne donc, sans le redoubler ou le répéter, à tirer profit des éléments que le moment de l’interprétation littéraire permet de dégager ; en particulier, le rôle dévolu au langage, la relative dislocationprolifération à laquelle le poème nous convie, pourront être retenus et examinés avec soin. Pour comprendre, il faut en effet nommer, et penser en nommant : la violence est-elle nommable ? est-elle pensable ? sous quel régime de discours ?

• le terme de « compréhension », que le sujet met en œuvre, appelle un questionnement suffisamment ouvert et précis, afin que l’équivoque qu’il implique ne soit pas éludée : s’agit-il de constater (ce qui n’est pas encore, sans doute, comprendre, mais qui requiert déjà un regard attentif, instruit ou au moins prudent) ? s’agit-il d’observer, d’étudier et de caractériser (ce qui nécessite le recours à un jeu catégoriel et classificatoire, et pose la question des médiations et des instruments venant en appui de cette observation, comme celle des concepts permettant d’arrêter, ne serait-ce que provisoirement, un contenu de savoir) ? s’agit-il d’expliquer (ce qui appelle un travail de mise en relations et en rapports dans lequel la question de la causalité (ou des causalités) vient jouer un côté éminent) ? s’agit-il de donner sens, sur le fondement de ce qui constituerait une connaissance suffisamment ample, à la hauteur d’une interrogation sur les fins ? On peut attendre des élèves qu’ils soient, d’une manière ou d’une autre, sensibles à ces questions, et qu’ils parviennent, même approximativement, à s’y placer en interrogation et en recherche.

• la question posée invite à une réflexion sur les limites de la compréhension : pourquoi la violence échapperait-elle à notre compréhension ? à qui échapperaitelle alors ? à quoi ? qu’appelle-t-on alors « violence » et comment considère-ton cet objet (à supposer que la violence soit ou devienne justement objet) ou cette expérience ? En faisant appel aux connaissances et aux réflexions acquises au cours de l’année, les élèves pourront montrer qu’ils sont sensibles aussi bien à la complexité des phénomènes mis en jeu qu’aux difficultés ou aux obstacles rencontrés par nos efforts ou nos habitudes de compréhension. • on appréciera aussi que la question de la compréhension ne soit pas rabattue sur celle de la justification ou que leurs articulations éventuelles soient questionnées et construites.

Ecrire la guerre - TEMOIGNAGE ET MEMOIRE

TEMOIGNAGE ET MEMOIRE JORGE SEMPRUN, L’ÉCRITURE OU LA VIE (1994)

Il y aura des survivants, certes. Moi, par exemple. Me voici survivant de service, opportunément apparu devant ces trois officiers d'une mission alliée pour leur raconter la fumée du crématoire, la chair brûlée sur l'Ettersberg, les appels sous la neige, les corvées meurtrières, l'épuisement de la vie, l'espoir inépuisable, la sauvagerie de l'animal humain, la grandeur de l'homme, la nudité fraternelle et dévastée du regard des copains. Mais peut-on raconter ? Le pourra-t-on ? Le doute me vient dès ce premier instant. Nous sommes le 12 avril 1945, le lendemain de la libération de Buchenwald. L'histoire est fraîche, en somme. Nul besoin d'un effort de mémoire particulier. Nul besoin non plus d'une documentation digne de foi, vérifiée. C'est encore au présent, la mort. Ça se passe sous nos yeux, il suffit de regarder. Ils continuent de mourir par centaines, les affamés du Petit Camp, les Juifs rescapés d'Auschwitz. Il n'y a qu'à se laisser aller. La réalité est là, disponible. La parole aussi. Pourtant un doute me vient sur la possibilité de raconter. Non pas que l'expérience vécue soit indicible. Elle a été invivable, ce qui est tout autre chose, on le comprendra aisément. Autre chose qui ne concerne pas la forme d'un récit possible, mais sa substance. Non pas son articulation, mais sa densité. Ne parviendront à cette substance, à cette densité transparente que ceux qui sauront faire de leur témoignage un objet artistique, un espace de création. Ou de recréation. Seul l'artifice d'un récit maîtrisé parviendra à transmettre partiellement la vérité du témoignage. Mais ceci n'a rien d'exceptionnel : il en arrive ainsi de toutes les grandes expériences historiques.

PRIMO LEVI, CHAPITRE 2 : « LE FOND », SI C’EST UN HOMME (1947)

En moins de temps qu'il n'en faut pour comprendre, nous nous retrouvons dehors dans la neige bleue et glacée de l'aube, trousseau en main, obligés de courir nus et déchaussés jusqu'à une autre baraque, à cent mètres de là. Et là enfin, on nous permet de nous habiller. Cette opération terminée, chacun est resté dans son coin, sans oser lever les yeux sur les autres. Il n'y a pas de miroir, mais notre image est devant nous, reflétée par cent visages livides, cent pantins misérables et sordides. Nous voici transformés en ces mêmes fantômes entrevus hier au soir. Alors, pour la première fois, nous nous apercevons que notre langue manque de mots pour exprimer cette insulte : la démolition d'un homme. En un instant, dans une intuition quasi prophétique, la réalité nous apparaît : nous avons touché le fond. Il est impossible d'aller plus bas : il n'existe pas, il n'est pas possible de concevoir condition humaine plus misérable que la nôtre. Plus rien ne nous appartient : ils nous ont pris nos vêtement, nos chaussures, et même nos cheveux ; si nous parlons, ils ne nous écouteront pas, et même s'ils nous écoutaient, ils ne nous comprendraient pas. Ils nous enlèveront jusqu'à notre nom : et si nous voulons le conserver, nous devrons trouver en nous la force nécessaire pour que derrière ce nom, quelque chose de nous, de ce que nous étions, subsiste.
 Nous savons, en disant cela, que nous serons difficilement compris, et il est bon qu'il en soit ainsi. Mais que chacun considère en soimême toute sa valeur, toute la signification qui s'attache à la plus anodine de nos habitudes quotidiennes, aux milles petites choses qui nous appartiennent et que même le plus humble des mendiants possède : un mouchoir, une vieille lettre, la photographie d'un être cher. Ces choses-là font partie de nous presque autant que les membres de notre corps, et il n'est pas concevable en ce monde d'en être privé, qu'aussitôt nous ne trouvions à les remplacer par d'autres objets, d'autres parties de nous-mêmes qui veillent sur nos souvenirs et les font revivre. Qu'on imagine maintenant un homme privé non seulement des êtres qu'il aime, mais de sa maison, de ses habitudes, de ses vêtements, de tout enfin, littéralement de tout ce qu'il possède : ce sera un homme vide, réduit à la souffrance et au besoin, dénué de tout discernement, oublieux de toute dignité : car il n'est pas rare, quand on a tout perdu, de se perdre soi-même ; ce sera un homme dont on pourra décider de la vie ou de la mort le cœur léger, sans aucune considération d'ordre humain, si ce n'est, tout au plus, le critère d'utilité. On comprendra alors le double sens du terme « camp d'extermination11 » et ce que nous entendons par l'expression « toucher le fond ». Häftling12 : j'ai appris que je suis un Häftling. Mon nom est 174 517; nous avons été baptisés et, aussi longtemps que nous vivrons, nous porterons cette marque tatouée sur le bras gauche.

Question d’interprétation littéraire : Comment ce texte évoque-t-il la déshumanisation à l’œuvre dans les camps de concentration ?

RENÉ CHAR, FRAGMENT 128, FEUILLETS D’HYPNOS (1946)

Le boulanger n’avait pas encore dégrafé les rideaux de fer de sa boutique que déjà le village était assiégé, bâillonné, hypnotisé, mis dans l’impossibilité de bouger. Deux compagnies de S.S. et un détachement de miliciens le tenaient sous la gueule de leurs mitrailleuses et de leurs mortiers. Alors commença l’épreuve. Les habitants furent jetés hors des maisons et sommés de se rassembler sur la place centrale. Les clés sur les portes. Un vieux, dur d’oreille, qui ne tenait pas compte assez vite de l’ordre, vit les quatre murs et le toit de sa grange voler en morceaux sous l’effet d’une bombe. Depuis quatre heures j’étais éveillé. Marcelle était venue à mon volet me chuchoter l’alerte. J’avais reconnu immédiatement l’inutilité d’essayer de franchir le cordon de surveillance et de gagner la campagne. Je changeai rapidement de logis. La maison inhabitée où je me réfugiai autorisait, à toute extrémité, une résistance armée efficace. Je pouvais suivre de la fenêtre, derrière les rideaux jaunis, les allées et venues nerveuses des occupants. Pas un des miens n’était présent au village. Cette pensée me rassura. À quelques kilomètres de là, ils suivraient mes consignes et resteraient tapis. Des coups me parvenaient, ponctués d’injures. Les S.S. avaient surpris un jeune maçon qui revenait de relever des collets. Sa frayeur le désigna à leurs tortures. Une voix se penchait hurlante sur le corps tuméfié : « Où est-il ? Conduis-nous », suivie de silence. Et coups de pied et coups de crosse de pleuvoir. Une rage insensée s’empara de moi, chassa mon angoisse. Mes mains communiquaient à mon arme leur sueur crispée, exaltaient sa puissance contenue. Je calculais que le malheureux se tairait encore cinq minutes, puis, fatalement, il parlerait. J’eus honte de souhaiter sa mort avant cette échéance. Alors apparut jaillissant de chaque rue la marée des femmes, des enfants, des vieillards, se rendant au lieu de rassemblement, suivant un plan concerté. Ils se hâtaient sans hâte, ruisselant littéralement sur les S.S., les paralysant « en toute bonne foi ». Le maçon fut laissé pour mort. Furieuse, la patrouille se fraya un chemin à travers la foule et porta ses pas plus loin. Avec une prudence infinie, maintenant des yeux anxieux et bons regardaient dans ma direction, passaient comme un jet de lampe sur ma fenêtre. Je me découvris à moitié et un sourire se détacha de ma pâleur. Je tenais à ces êtres par mille fils confiants dont pas un ne devait se rompre. J’ai aimé farouchement mes semblables cette journée-là, bien au-delà du sacrifice.

René  Char  est  un  auteur  français  né  en  1907  et  mort  en  1988

Les  Feuillets  d’Hypnos comprennent 237 textes écrits au maquis durant l’occupation allemande en 1943 et 1944, il est membre de la résistance -  Hypnos est dans la mythologie le Dieu du Sommeil, le veilleur qui attend l’aube et celui qui attend la lumière. Ils sont dédiés à Albert Camus.

 Le fragment 128 est  un poème en prose, le plus long du recueil : il raconte l’arrivée de soldats nazis dans un petit village du sud de la France dans lequel un résistant se cache.

 Problématique :

En quoi ce texte est-il un hommage à la résistance?

 

Pour aller plus loin

  • Consulter l'analyse proposée du fragment 
  • FragmentFragment (22.41 Ko)
  •  Cinéma :
  • R. Benigni, La vie est belle, 1997 / A. Resnais, Nuit et brouillard, 1955 / S. Spielberg, La liste de Schindler, 1993.

« Guernica » de Picasso

Guernica Picasso

« La peinture n’est pas faite pour décorer les appartements; c’est une arme offensive et défensive contre l’ennemi », c’est ce que déclara Picasso à propos de Guernica.

Elle est le symbole fort de la fin de la dictature, une dénonciation des violences et des horreurs de la guerre 

le tableau représente le bombardement de Guernica,une scène de violence, de douleur, de mort et d'impuissance

Titre de l’œuvre : « Guernica »

Genre de L’œuvre : Peinture historique et engagée

Artiste : Pablo Picasso 1881 – 1973

Date de création : 1937

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Date de dernière mise à jour : 08/01/2023

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