Etude linéaire, Marivaux, Les Fausses Confidences, Acte II, scène 13 -

De quelle manière le stratagème d’Araminte permet-il la révélation des sentiments des personnages?

Fausses confidences

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Exercices bac français Marivaux Les Fausses confidences parcours théâtre et stratagème.Evaluez votre niveau, testez vous, progressez avec les quiz

Exercices 2 4

Exercices bac français Marivaux Les Fausses confidences parcours théâtre et stratagème.Evaluez votre niveau, testez vos connaissances

Exercices bac français Marivaux Les Fausses confidences parcours théâtre et stratagème.Evaluez votre niveau, testez vous, progressez avec les quiz, QCM, questionnaires

Support texte : II, 13

Dorante, Araminte, Dubois

DUBOIS, sortant, et en passant auprès de Dorante, et rapidement. − Il m’est impossible de l’instruire ; mais qu’il se découvre ou non, les choses ne peuvent aller que bien.
DORANTE. − Je viens, Madame, vous demander votre protection. Je suis dans le chagrin et dans l’inquiétude : j’ai tout quitté pour avoir l’honneur d’être à vous, je vous suis plus attaché que je ne puis le dire ; on ne saurait vous servir avec plus de fidélité ni de désintéressement ; et cependant je ne suis pas sûr de rester. Tout le monde ici m’en veut, me persécute et conspire pour me faire sortir. J’en suis consterné ; je tremble que vous ne cédiez à leur inimitié pour moi, et j’en serais dans la dernière affliction.
ARAMINTE, d’un ton doux. − Tranquillisez-vous ; vous ne dépendez point de ceux qui vous en veulent ; ils ne vous ont encore fait aucun tort dans mon esprit, et tous leurs petits complots n’aboutiront à rien ; je suis la maîtresse.
DORANTE, d’un air bien inquiet. − Je n’ai que votre appui, Madame.
ARAMINTE. − Il ne vous manquera pas ; mais je vous conseille une chose : ne leur paraissez pas si alarmé, vous leur feriez douter de votre capacité, et il leur semblerait que vous m’auriez beaucoup d’obligation de ce que je vous garde.
DORANTE. − Ils ne se tromperaient pas, Madame ; c’est une bonté qui me pénètre de reconnaissance.
ARAMINTE. − À la bonne heure ; mais il n’est pas nécessaire qu’ils le croient. Je vous sais bon gré de votre attachement et de votre fidélité ; mais dissimulez-en une partie, c’est peut-être ce qui les indispose contre vous. Vous leur avez refusé de m’en faire accroire sur le chapitre du procès ; conformez-vous à ce qu’ils exigent ; regagnez-les par là, je vous le permets : l’événement leur persuadera que vous les avez bien servis ; car toute réflexion faite, je suis déterminée à épouser le Comte.
DORANTE, d’un ton ému. − Déterminée, Madame !
ARAMINTE. − Oui, tout à fait résolue. Le Comte croira que vous y avez contribué ; je le lui dirai même, et je vous garantis que vous resterez ici ; je vous le promets. (À part.) Il change de couleur.
DORANTE. − Quelle différence pour moi, Madame !
ARAMINTE, d’un air délibéré. − Il n’y en aura aucune, ne vous embarrassez pas, et écrivez le billet que je vais vous dicter ; il y a tout ce qu’il faut sur cette table.
DORANTE. − Et pour qui, Madame ?
ARAMINTE. − Pour le Comte, qui est sorti d’ici extrêmement inquiet, et que je vais surprendre bien agréablement par le petit mot que vous allez lui écrire en mon nom. (Dorante reste rêveur, et par distraction ne va point à la table.) Eh ! vous n’allez pas à la table ? À quoi rêvez-vous ?
DORANTE, toujours distrait. − Oui, Madame.
ARAMINTE, à part, pendant qu’il se place. − Il ne sait ce qu’il fait ; voyons si cela continuera.
DORANTE, à part, cherchant du papier. − Ah ! Dubois m’a trompé !
ARAMINTE, poursuivant. − Êtes-vous prêt à écrire ?
DORANTE. − Madame, je ne trouve point de papier.
ARAMINTE, allant elle−même. − Vous n’en trouvez point ! En voilà devant vous.
DORANTE. − Il est vrai.
ARAMINTE. − Écrivez. Hâtez-vous de venir, Monsieur ; votre mariage est sûr… Avez-vous écrit ?
DORANTE. − Comment, Madame ?
ARAMINTE. − Vous ne m’écoutez donc pas ? Votre mariage est sûr ; Madame veut que je vous l’écrive, et vous attend pour vous le dire. (À part.) Il souffre, mais il ne dit mot ; est-ce qu’il ne parlera pas ? N’attribuez point cette résolution à la crainte que Madame pourrait avoir des suites d’un procès douteux.
DORANTE. − Je vous ai assuré que vous le gagneriez, Madame : douteux, il ne l’est point.
ARAMINTE. − N’importe, achevez. Non, Monsieur, je suis chargé de sa part de vous assurer que la seule justice qu’elle rend à votre mérite la détermine.
DORANTE, à part. − Ciel ! je suis perdu. (Haut.) Mais, Madame, vous n’aviez aucune inclination pour lui.
ARAMINTE. − Achevez, vous dis-je… Qu’elle rend à votre mérite la détermine… Je crois que la main vous tremble ! vous paraissez changé. Qu’est−ce que cela signifie ? Vous trouvez-vous mal ?
DORANTE. − Je ne me trouve pas bien, Madame.
ARAMINTE. − Quoi ! si subitement ! cela est singulier. Pliez la lettre et mettez : À Monsieur le Comte Dorimont. Vous direz à Dubois qu’il la lui porte. (À part.) Le cœur me bat ! (À Dorante.) Voilà qui est écrit tout de travers ! Cette adresse-là n’est presque pas lisible. (À part.) Il n’y a pas encore là de quoi le convaincre.
DORANTE, à part. − Ne serait-ce point aussi pour m’éprouver ? Dubois ne m’a averti de rien.

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  • Autre étude linéaire II, 13

Etude linéaire, II,13Etude linéaire, II,13 (1.83 Mo)

La mise en place du piège par Araminte

Araminte propose à Dorante de faire croire à sa mère et au Comte qu’il est favorable à son mariage afin de regagner leur confiance. Araminte en profite pour révéler à son intendant qu’elle veut se marier : “toute réflexion faite, je suis déterminée à épouser le comte".

● Dorante est alors ému : Réduction syntaxique des phrases de Dorante, réduites à leur plus simple expression → Perte de l’usage du langage = signe du trouble de Dorante (“Déterminée, Madame !)

● Le vocabulaire employé est significatif d’une décision irrévocable : « je suis déterminée » (l 1), « résolue » (l 2) et participe à la dureté d’Araminte.Elle lui assure, à la fois, qu’elle veut se marier avec le comte et que cela permettra de gagner la confiance du comte. Elle commence à voir que son stratagème marche comme le suggère la réplique “Il change de couleur” qu’elle dit aux spectateurs puis la phrase exclamative qui arrive juste après : “Quelle différence pour moi, Madame!”. On retrouve alors la jouissance d’Araminte face à la torture “amoureuse” qu’elle impose à Dorante.

● Les verbes à l’impératif : “ne vous embarrassez pas “ et "écrivez “ témoignent de l’ascendant social d’Araminte, ou Dorante est à son service + Déséquilibre des répliques (longueur) entre Dorante et Araminte révélateur de la domination/supériorité d’Araminte.

● Dorante est troublé comme l’indique l’interrogation (« Et pour qui, madame ? » ), mais il est contraint de se soumettre aux codes que sa situation professionnelle exige, d’où son interrogation accompagnée d’une adresse polie (« madame« )

● Araminte explique à Dorante que la lettre annonçant le mariage est « Pour le comte » et a pour but de « le surprendre bien agréablement » car il est parti « extrêmement inquiet« . L’antithèse « agréablement » / « inquiet », qui évoque les sentiments du Comte → effet comique( reflète aussi la succession d’émotions qu’éprouve Dorante à cette nouvelle).

● La tâche imposée par Araminte à Dorante constitue une épreuve qui est censée pousser Dorante à révéler son amour. En effet, l’expression « le petit mot » est une litote qui traduit la cruauté de ce piège.

Lignes 32 à 47: Les ressorts de la théâtralité

Dorante est sous le choc comme l’indique la didascalie “reste rêveur”. Araminte l’interpelle donc : “Hé bien ?”, “à quoi rêvez-vous?” Dorante répond alors “oui, Madame” comme si elle lui avait posé une question fermée, ce qui traduit son trouble et sa perte de contrôle face à la situation.

● Araminte jouit avec cruauté de ce stratagème amoureux, et commente : « Il ne sait ce qu’il fait ».

● Dorante pense alors être trompé par Dubois dans une exclamation, “Dubois m’a trompé!”. Cela montre le comique de la pièce qui repose sur des séries de fausses confidences qui perturbent chaque personnage.

● La réplique “Madame, je ne trouve point de papier” illustre la stratégie de retardement de Dorante qui cherche à repousser le moment de l’écriture de la lettre. La situation devient alors comique lorsque Araminte lui répond qu’il y en a devant lui.

● Araminte ordonne donc à Dorante d’écrire et commence à lui dicter ce qu’il doit écrire (utilisation de l’impératif “écrivez”). La lettre semble avoir un double sens puisqu’Araminte s’adresse indirectement à Dorante → “Hâtez-vous” => incite Dorante à révéler son amour.

● L’interrogation de Dorante indique qu’il est confus et qu’il ne veut pas écrire (“Comment, Madame?”). Cette interrogation très courte et qui ne répond pas à la question d’Araminte montre encore une fois le trouble de Dorante qui se traduit par une perte de l’usage du langage.

● Le double jeu est observable tout au long de la scène et ce grâce aux apartés. La scène est donc sur 3 dimensions : entre les deux personnages, Araminte et spectateurs, Dorante et spectateurs. Nous découvrons une Araminte sévère et implacable. Lorsqu’elle dicte la lettre à Dorante, nous remarquons un décalage entre la réplique dite à voix haute et celle prononcée à part : « Votre mariage est sûr; Madame veut que je vous l’écrive, et vous attend pour vous le dire.» (A part.) Il souffre, mais il ne dit mot. Est-ce qu’il ne parlera pas ? » → révèle sa peur de ne pas obtenir les aveux de Dorante + comique )

● => Les paroles adressées à Dorante semblent être prononcées par une femme sûre d’elle et inflexible tandis que les mots formulés à part traduisent ses doutes et ses incertitudes.

● Araminte évoque alors le « procès douteux » qui l’oppose au Comte “douteux "= adjectif dépréciatif → rappelle que le mariage est une union d’affaires. → Dorante s’exclame, contestant la pertinence de l’adjectif : “Douteux, il ne l’est point. “

Lignes 48 à 57 : Un aveu imminent

Elle n’est pas atteinte par sa remarque comme le montre le mot “n’importe” ainsi que l’impératif “achevez”. On retrouve également ici son côté sévère envers Dorante (comme dans le mouvement 2)

● Dorante désespère en aparté : « Ciel ! je suis perdu ! » au passé composé qui exprime une action révolue, soulignant la désillusion de l’intendant. Il émet une timide opposition à cette improbable union entre Araminte et le comte introduite par la conjonction de coordination « mais » : «Mais, Madame, vous n’aviez aucune inclination pour lui. »

● Araminte ignore encore une fois sa remarque et lui ordonne” d'acheve[r] ” comme l’indique l’emploi de l’impératif = sadisme d’ Araminte.

● Araminte tente de provoquer la déclaration amoureuse de Dorante par une suite d’interrogations brèves : “ Qu’est-ce que cela signifie ? Vous trouvez-vous mal ?” → Dorante est poussé aux aveux = il ne se trouve pas bien trahissant ses véritables sentiments envers Araminte.

● Elle est surprise et déçue par la réponse de Dorante comme le montrent les interrogations “Quoi! Si subitement! Cela est singulier.” L’emploi de l’impératif “Pliez”, “Mettez” et l’ordre “Vous devez” montre qu’elle tente de se reprendre tout de même et de ne pas laisser transparaître sa déception.

● A travers la phrase exclamative “Voilà qui est écrit tout de travers! Cette adresse-là n’est presque pas lisible”, Araminte cherche à provoquer Dorante. Mais cette exclamation montre également sa déception puisqu’elle critique Dorante.

● “le coeur me bat “ en aparté : signe du trouble et de l'émoi qui trahissent les véritables sentiments → travestissement amoureux d’Araminte.

● Sa déception est encore plus claire lorsqu’elle confesse “Il n’y a pas encore là de quoi le convaincre” : elle pense avoir échoué.

● Mais à la fin de la scène, Dorante se rend compte du piège d’Araminte : “Ne serait-ce point aussi pour m’éprouver ?” → Signe de son trouble puisque ce n’est qu’à la fin qu’il se rend compte.

Marivaux met en scène la ruse d'Araminte qui tend un piège à Dorante afin de lui extorquer un aveu (une déclaration d'amour), mais aussi le double travestissement amoureux dans la scène (chacun masque et déguise ses véritables sentiments à sa manière : Araminte, en portant un masque, entend démasquer son intendant-prétendant)

● Les personnages se manipulent entre eux pour découvrir la réalité.

● Marivaux offre ainsi une pièce où la vérité naît du mensonge, dans une société où les inégalités sociales et les mœurs entravent l’expression sincère de l’amour.

● Dans cette scène Araminte devient celle qui manipule et qui manie l’art du mentir-vrai : mentir car elle fait croire qu’elle va épouser le comte, vrai car elle fait naître le mensonge espérant que la vérité, à savoir que Dorante l’aime, voit le jour.

● Ainsi, on constate que chez Marivaux, le langage a la fonction à la fois de couverture sociale et de dévoilement des sentiments. Le trouble de Dorante apparaît ici malgré l’étiquette langagière.

Ouverture :

● Le jeu de l'amour et du hasard de Marivaux. Jeu de travestissement entre les personnages : amoureux/ vestimentaire : Après que Dorante annonce à Sylvia qui il est et lui explique pourquoi il s'est déguisé, cette dernière décide de lui cacher qui elle est. Elle met alors en place un stratagème pour voir si ce dernier serait prêt à l’épouser en la pensant servante..

Date de dernière mise à jour : 28/02/2023

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